• Les origines du Curly, hypothèses et lectures

    Quelques recherche et hypothèses historiques sur notre race Curly

    Rare et nouveau, le curly ? Pas tant que ça. De même que les robes colorées étaient appréciées sous les rois français et bien connues, le poil frisé n'est pas mentionné comme quelque chose de rarissime chez les Encyclopédistes. Mais ce poil particulier n'était pas recherché, et même parfois éliminé des élevages.

    Ainsi, Charles Darwin, Frédéric Cuvier, Audouin, Hamilton Smith, Charles Dessalines d'Orbigny, parlent sans s'émouvoir de chevaux frisés en Europe. Ils leur donnent le nom de Bashkir la plupart du temps. Aujourd'hui, Bashkir désigne une race précise de l'Oural, mais il y a deux siècles, c'était un mot plus général, parfois synonyme de Cosaque. Les contacts fréquents avec ces cosaques, par les guerres et pour remonter la pauvre cavalerie française sous Napoléon, expliquent que s'il y a eu des "Bashkir" frisés qui ont été présents à l'Ouest européen et plus particulièrement en France à cette époque. Le plus drôle est qu'un cheval à poil frisé "venant de Tartartie" (donc cosaque) est exposé au Muséum d'histoire naturelle de Paris ! (Source ancienne du Guide de Paris de 1814, dès que je vais à Paris je vérifie mais il est peut être est-il remisé dans les sous-sols ! Info bienvenue !) CF Texte Baron de Comeau ci dessous

    C'est Frédéric Cuvier qui mentionne le plus des chevaux frisés. Il parle d' un étalon bai-brun "de la race à poil frisé" utilisé pour la production expérimentale de mules, dans son Dictionnaire des sciences naturelles de 1817. Ce pourrait être le même que celui dont parle Hamilton Smith dans Histoire naturelle du cheval, un étalon noir frisé subtilisé à l'empereur d'Autriche et arrivé en France, "croisement entre le Bashkir et le French Black". Cet auteur dit qu'il a lui aussi possédé un cheval rouan frisé, qu'il a acheté chez un marchand qui indiquait que l'animal venait "des montagnes Magdaléniennes de Colombie" (oui, oui, les importations de chevaux allaient bon train à l'époque !), mais Smith pense que son cheval venait sans doute plutôt de l'Est, puisque "le type originel (frisé) vient d'Asie". Frédéric Cuvier nous dit aussi que Pallas a observé des curlies en Russie, "dans la région entre le Jaïk et la Volga", et aussi D'Azara en Amérique du Sud (voir plus bas ce texte édifiant).

    Il y a des contradictions au sujet de la couleur des chevaux frisés, les uns associant souvent la frisure et la couleur blanche (textes plus anciens, Pline, Léon l'Africain et dans un traité de maréchalerie), les autres au contraire les disent de robes foncées (textes du XIXème). Souvent la frisure est considérée comme une tare ou une curiosité de chevaux revenus à l'état sauvage, ou de condition inférieure (élimination de la reproduction). Les auteurs citent aussi le cheval Norvégien comme de poil floconneux/frisé, mais au vu des documents photos ou gravures il ne s'agirait pas -à mon avis - de véritables curlies (poil d'hiver hyper développé mais juste ondulé et crins plats).


    Essais sur l'histoire naturelle des quadrupèdes du Paraguay
    par Félix d'Azara (1801)

    "J'ai vu beaucoup de chevaux crépus, que dans le Paraguay on nomme Pichay. Leur poil est entortillé comme celui des nègres de Guinée [SIC] et leur sabot est absolument semblable à celui du mulet. J'en ai vu de poils différents mais point de pie ni de blanc. J'ai remarqué que les poils de la queue et de la crinière, crépus également, sont beaucoup plus courts que le commun des chevaux. [...] Cette race se reproduit et mélée à des chevaux ordinaires il en résulte des chevaux qui sont métis. Ces chevaux passent pour plus forts mais comme ils paraissent plus laids on cherche à les détruire en châtrant les mâles et en tuant les juments crépues [SIC]. Néamoins on ne parvient pas à ce but parce qu'il en nait quelques uns de père et mère ordinaires.


    La correspondance avec notre curly américain est saisissante, la description correspond très bien. Il parait évident à cette lecture que des curlies d'Amérique du Sud ont accompagné les hordes de chevaux sauvages qui allaient vers le Mexique et les USA. Est-ce l'unique origine du curly, sans doute pas, mais au moins en partie.


    Autre note à étudier : Dans les études sur les chevaux de Solutré, l'un des vestige préhistorique est dit "du cheval à la crinière crépue".

    Napoléon aurait-il possédé et monté un cheval frisé ??? J'ai posé la question à Philippe Osché, auteur de Les Chevaux de Napoléon. Malheureusement il n'en savait rien. Voici notre indice :

    Texte "inédit" dans les recherches car en français :

    Ce cheval, si furieux avant, restait là, sans bouger ; je le pris aussi, bien qu’il essayât de faire le difficile, se cabrant, donnant des coups de pied de devant. Aidé par je ne sais qui je le montai et je n’en ai jamais eu de si bon et de si doux. .C’était un de ces petits chevaux kalmouks, à moitié sauvages comme leurs maîtres ; je le remis au Roi de Bavière qui m’avait semblé le désirer; en place le Roi m’envoya un rouleau de ducats cacheté. Je crois qu’il le donna à Napoléon. Du moins quelques officiers de sa connaissance m’ont assuré l’avoir vu à Paris, au jardin des plantes, mais c’en était peut-être un autre, car j’en ai retrouvé en Russie beaucoup de cette race, peu connue dans nos contrées. Le pelage de celui-ci était noir et formait une épaisse toison frisée comme celle d’un chien barbet, queue et crinière très fournies et les jambes de devant courtes et couvertes en arrière de flocons de crin comme des barbes de bouc. 
    "Souvenirs des guerres d'Allemagne pendant la Révolution et l'Empire",capitaine baron de Comeau, 1900
     
     


    Des hypothéses sages ou folles en vrac :

    -Si les chevaux frisés n'étaient pas très recherchés en Europe, il est bien normal qu'on s'en soit débarrasé en les envoyant en Amérique avec les bateaux des colons. Les Espagnols étaient très regardant sur les couleurs de leurs chevaux et pour eux le poil frisé signait un cheval paresseux et lymphatique.

    -Les amérindiens seraient issus d'Asie, certains de ces peuples asiatiques colonisateurs (voyageant avec leurs chevaux nord-indiens ou russes frisés ?) ont fait le grand tour par le nord de l'Europe (chevaux frisés en Norvège ?) et sont aussi passés par l'Alaska. Auraient-ils amené des chevaux frisés avec eux ? Bien sur il est notoire qu'il n'y avait pas de chevaux en Amérique avant le XVIème siècle, mais un reportage archéologique vu sur Arte, s'appuyant sur la découverte d'un squelette de cheval semblait dire le contraire... Bien que la règle puisse avoir des exception, un cheval égaré ou sans descendance est possible, il n'y a pas eu assez de fouilles en Amérique pour tirer des affirmations. Cette thèse est soutenue dans plusieurs ouvrages généraux, dont Cent chevaux de Légende (solar).

    -Continuons, encore plus fou, si vous le permettez ! S'il y avait eu des chevaux avant les colons européens en Amérique, voici une explication amusante et plus romantique que scientifique... Le cheval moderne aurait vu le jour en Amérique au Pléistocène. Puis une période de glaciation est arrivée. Les Mammouths sont devenus laineux et ont migré en Amérique du Sud, tandis que d'autres passaient le détroit de Béring pour se réfugier en Asie. Pourquoi les chevaux n'auraient-ils pas fait de même, développant un poil frisé (car les curlies sont très visiblement des chevaux bâtis pour lutter contre un froid intense, voir les traits physiques) et se cachant soit en Asie (Bashkir, Lokaï) soit au Sud de l'Amérique ? Bien caché à l'Est de l'Amérique du Sud dans des régions inexplorées de l'homme (et il y en a (eu) sans contestation possible, et des régions où les fouilles archéologiques sont quasi-impossibles), le cheval à poil laineux aurait survécu. Lorsque les chevaux des Espagnols sont arrivés, beaucoup ont retrouvé la liberté et sont partis à l'Est. Ils se sont alors mélangés à ces chevaux natifs frisés. Et voilà nos curlies, avec leur gène dominant (pas mutant/récessifs, tous les gènes anciens et sauvages sont dominants) et leurs traits physiques si spéciaux !!!! Allez, c'était un coup de folie, mais les pièces du puzzle s'emboiteraient si bien que j'ai voulu vous le faire partager !

    Une petite nuance : une recherche génétique comparative a été faite entre le Bashkir russe et le Curly américain. Les liens de parentés sont peu évidents. Mais si le mot Bashkir a été si longtemps employé comme quasi-synonyme de "cosaque" et "tartare", il désigne autre chose aujourd'hui, une race bien précise... Il n'y a sans doute pas grand chose de commun entre le Bashkir actuel et celui dont parlent nos encyclopédiste... alors le mystère du curly réside peut être dans un simple problème de sémantique ?!!

    NOTE : sur des tests sanguins faits sur 200 curlies par Shan Thomas, deux juments montraient un profil génétique complètement inconnu et comparable à aucune race identifiée. Ils s'agissait de deux juments Damele, La Raine et Old Sue.


     


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